« Jamais tant que ça voulu être quelqu’un. Je n’ai eu de réalité que dans des amours qui en avaient bien peu, mais l’amour m’aura rendu la vie réelle. »
L’auteur de cette note retrouve une jeune femme qu’il a aimée adolescente, huit ans auparavant. Ils partent pour Venise, où ils tentent de reprendre leur histoire. Confrontation plutôt que fusion, tel est leur ressort amoureux, car bien plus retorse que leurs trente ans de différence d’âge est la tension incestueuse qui s’installe entre eux.
Il tient la chronique de cet amour dans un carnet où, par fragments, se dessine l’impossibilité d’approcher autant qu’on le désire l’être aimé, qui se dérobe toujours.
Que faire de cette énigme, de cet état de joie déchirante (connaissance et douleur ensemble) sinon chercher une forme pour la dire ?
« Cette angoisse dans l’amour dont j’aurai fait ma joie », écrit-il.
Il n’existe pas d’amours non réciproques puisqu’on s’accomplit par l’amour et non dans l’amour. Est-ce à dire qu’il n’existe pas de rendez-vous manqués ? Une question que pose ce récit amoureux, alliant écriture intime et profondeur métaphysique.
« Une manière d’aboutissement. Il double Le monde entier est ma cachette, paru en 2006, un des romans les plus étonnants et accomplis de la décennie. (…) Il parvient via la communication de l’incommunicable schizophrénie objective, à rendre compte par ellipses et incises de tout le réel du rapport homme/femme : « Elle voyait par fragments ce que j’imaginais en totalité », dans le roman ; « La jouissance ne dit pas la vérité au désir. Elle lui ment par plaisir », dans ce livre de fragments. »
Extrait de la postface de Mehdi Belhaj Kacem.
Approche du principe d’éloignement. Postface de Mehdi Belhaj Kacem. Éditions Léo Scheer, 2012.